Cerises, fraises, framboises, mûres, cassis, myrtilles, abricots, pêches, mais aussi figues, tomates et raisins… Aussi minuscule soit-elle, Drosophila suzukii soulève l’inquiétude chez bien des producteurs. À la différence des autres drosophiles, la femelle suzukii perce la peau du fruit en maturation pour y pondre ses œufs, favorisant ainsi la contamination par diverses bactéries et champignons. Les larves se nourrissent de la pulpe, creusent des galeries entre la chair et l’épiderme du fruit qui coule et se vide. Les pertes estimées peuvent atteindre 80 % de la production.
Drosophila suzukii a été détectée en France à partir de 2009 et a commencé de poser problème aux producteurs de cerises et de fraises du sud-ouest à partir de 2011. Devant ce potentiel invasif inquiétant, l’Inra a rapidement engagé des recherches en priorisant la lutte biologique. L’interdiction récente du diméthoate renforce l’importance de recherches pour contrôler les populations de ce ravageur,qui prolifère aussi largement sur les fruits sauvages, et apporter des moyens de lutte alternatifs aux produits phytosanitaires.
Faire tomber Drosophila suzukii comme des mouches !
Les chercheurs de l’Institut Sophia-Agrobiotech (Inra Paca) explorent actuellement la piste des parasitoïdes exotiques, en l’occurrence des micro-guêpes, qui pondent dans les larves de Drosophila suzukii, s’y développent et les tuent. Pour Jean-Luc Gatti et Nicolas Ris qui participent au projet de recherche international Dropsa, « Drosophila suzukii est trop bien implantée dans le pays pour qu’il soit encore possible de l’éradiquer. La piste des parasitoïdes locaux n’a pas donné de résultats probants. » Testés sous quarantaine dans le laboratoire, les parasitoïdes candidats prélevés dans l’aire d’origine de la mouche (Japon et Chine) semblent plus prometteurs. Pour être efficaces, ils doivent être capables de s’implanter, de survivre sous nos latitudes et concentrer leur parasitisme sur Drosophila suzukii.
« Il s’agit de lutte biologique par acclimatation. Nous avons de bons espoirs avec des espèces de micro-guêpe des genres Asobara ou Ganaspis. Nous réalisons pour l’instant les tests requis en milieu confiné sur des élevages d’espèces locales et courantes de drosophiles, comme par exemple Drosophila melanogaster, pour montrer que ces parasitoïdes exotiques n’ont pas ou peu d’impact sur la biodiversité locale, conformément à la législation en vigueur depuis un an », expliquent les chercheurs. L’entretien des vergers, des parcelles, l’élimination des fruits abimés, l’utilisation des filets de protection… Toutes ces méthodes ont un impact important et sont prises en compte dans le projet Dropsa. « Nos travaux actuels en lutte biologique sur les parasitoïdes exotiques sont conditionnés par les autorisations pour passer aux expérimentations sur le terrain et un financement durable. Ils pourraient déboucher sur des résultats d’ici 2 à 3 ans. »